Chers paroissiens,
L’évangile de ce dimanche est un des passages qui a le plus scandalisé les disciples de Jésus. C’est le discours qui a bousculé le plus les apôtres et qui nous bouscule encore aujourd’hui. C’est tellement contraire à la nature d’aimer son ennemi, de tendre l’autre joue à celui qui t’a frappé, de donner ta tunique à celui qui a pris ton manteau, de souhaiter du bien à ceux qui vous maudissent, de donner à quiconque te demande, à ne rien réclamer à celui qui prend ton bien. Oui, cela est tellement contraire à ce que l’on nous apprend. C’est vrai qu’aimer ceux qui nous aiment n’a aucun mérite, de même que de recevoir en retour de ceux à qui nous avons prêté. Le Seigneur nous invite à être comme lui, miséricordieux, à pardonner comme lui. En fait Jésus nous décrit la manière d’être du Bon Dieu, miséricordieux. C’est à la mesure que nous prenons conscience de nos limites, de nos misères qu’il faut apprendre à être miséricordieux avec soi-même pour devenir miséricordieux avec les autres. Jésus n’a pas eu besoin d’avoir conscience de sa misère, de ses limites, lui qui est sans péché, mais gratuitement, il nous pardonne, ne nous juge pas, ne nous condamne pas. Cet évangile est l’une des plus belles expressions de la miséricorde, de l’amour gratuit et bienveillant de notre Dieu. Plus nous ferons l’expérience de notre misère, plus nous ferons l’expérience de la miséricorde infinie du Bon Dieu. Là, on touche à l’expérience extraordinaire de l’amour du Bon Dieu, de son infinie miséricorde, d’un Saint Paul, Saint Augustin, de Marie-Madeleine… Comment juger, condamner, haïr son ennemi, son prochain quand on a conscience qu’on aurait pu être comme lui, être à sa place? Le seul qui puisse condamner, juger, haïr est celui qui est parfait Amour, parfaite miséricorde : Jésus. C’est bien ce qu’il nous révèle avec la femme adultère, la samaritaine, Zachée… En fait, acceptons-nous de nous pardonner certaines fautes graves ? Quand nous partirons devant Dieu, aurons-nous avec nous-même cette attitude du Père prodigue qui accueille sans réprimande son cadet qui a gaspillé tout son héritage? Aurons-nous cette attitude d’admettre ce que nous avons fait de mal comme le larron crucifié avec Jésus : « nous s’est normal que nous soyons crucifiés, nous qui avons fait le mal. » Aurons-nous surtout cette attitude d’abandon, de confiance en la miséricorde infinie de Dieu face à ce que nous avons du mal à nous pardonner à nous mêmes. Là encore, c’est notre union au Christ qui peut nous donner de vivre pleinement cet évangile. Nous devons garder le plus possible notre regard, nos pensées sur la personne de Jésus, de son Père. Seul l’Esprit saint, don du Père et du Fils peut nous donner de vivre pleinement cet évangile. Nous touchons le cœur de notre foi chrétienne : l’Amour, l’agapé sans limite, totalement gratuit. Seul l’Amour qui accueille accepte la souffrance que mon prochain m’impose ou que je m’impose à moi-même en agissant comme mon ennemi. Cet ennemi peut-être l’autre, mais aussi moi-même (combien de jeunes ou moins jeunes se scarifient, se suicident…). L’amour seul est vainqueur de tous maux et Dieu est amour. Lui seul peut me donner d’aimer en souffrant et de souffrir en aimant. Vivons toujours plus notre union au Christ alors nous témoignons de notre Dieu, vrai Amour, miséricorde (non pas comme dans certaines religions où on épargne de couper le bras après avoir coupé la main par miséricorde divine. Cela n’est pas de la miséricorde, mais de la pure justice.) Le Dieu des chrétiens est pur miséricorde, d’où l’amour des martyrs pour leur bourreau, et non être martyr pour se sauver soi-même.
Le martyr chrétien accepte le martyre non pour se sauver, mais pour sauver son ennemi. Les témoignages des premiers martyrs du 1er siècle sont remarquables de cette miséricorde infinie. Malheureusement, peu de personnes ont lu ses témoignages.
Puissions-nous être suffisamment ancrés dans le Christ pour témoigner de cette miséricorde dans le quotidien de nos vies.
Aurions-nous eu le courage de David qui épargne son ennemi Saul par respect de ce qu’il est, l’oint du Seigneur?
Tout être humain n’est-il pas l’oint du Seigneur, même si le baptisé l’est par excellence …
Belle semaine . Père Gérard.